Contexte Général
La loi sur l’aménagement du territoire (LAT) vise une utilisation mesurée du territoire et la séparation entre différents types de terrains. Le 1er mai 2014, la première partie de la révision de la LAT est entrée en vigueur, déclenchant le processus d’adaptation des plans directeurs cantonaux et finalement des plans d’affectation communaux. En effet, le législateur impose, à travers la révision de la LAT, l’urbanisation des communes afin d’éviter la construction de bâtiments loin des centres et ainsi optimiser l’utilisation du territoire. Cela se traduit par l’identification des communes surdimensionnées et la réduction de la surface des terrains en zone constructible sur le territoire de ces dernières. Cette réduction engendrera des déclassements de terrains hors de la zone constructible entraînant une baisse de leur valeur et l’impossibilité de construire, du moins à moyen terme, pour les propriétaires des terrains concernés. Les plans d’affectation sont prévus pour une durée de 15 ans et doivent être révisés à la fin de cette période, même si le cadre législatif n’a pas changé.
Les changements au niveau fédéral suite à la révision de la LAT ont initié la révision des plans directeurs qui définissent la stratégie et le cadre pour l’utilisation du territoire cantonal. Les plans directeurs cantonaux ont, à l’exception de celui du Tessin, tous été approuvés par le Conseil fédéral. Le plan du Canton de Vaud a été approuvé après quelques adaptations, le 20 décembre 2019, par l’exécutif à Berne.
Canton de Vaud
La nouvelle version du plan directeur cantonal en vigueur donne la direction pour le développement du Canton de Vaud et l’utilisation du territoire. Il encadre ainsi la coordination entre les autorités et les différents acteurs lors de la planification du territoire. La LAT donne un délai de 8 ans, dès son entrée en vigueur, aux cantons pour la mise à jour des plans d’affectation communaux. Ces derniers répartissent le territoire en différentes zones, définissent l’utilisation du territoire et incluent un règlement. En vue de ce délai, le Canton a ainsi fixé la date du 20 juin 2022 pour la remise des nouveaux plans d’affectation communaux. Le Canton doit ensuite approuver les plans communaux dans les trois mois suivant leur remise ou demander des adaptations. Il est utile d’indiquer que jusqu’au processus d’approbation, le Canton et les communes coordonnent ensemble la révision des plans d’affectation, même si la révision de ceux-ci relève de la compétence des communes. Ce processus de coordination et d’approbation préliminaire peut provoquer des conflits entre la commune concernée et le Canton et occasionner une remise tardive des nouveaux plans d’affectations.
Le plan cantonal et la LAT prévoient l’urbanisation des communes afin d’éviter l’étalement urbain. Cette direction inclut le redimensionnement des zones à bâtir de communes surdimensionnées et engendrera ainsi, comme indiqué, le déclassement de certains terrains.
Communes surdimensionnées
Environ 70% des communes du Canton de Vaud sont surdimensionnées et ne sont ainsi pas conformes à la LAT. Pour savoir si une commune est surdimensionnée, la capacité d’accueil de nouveaux résidents est comparée à la croissance de la commune accordée par le Canton sur les 15 prochaines années (jusqu’en 2036). Si la capacité d’accueil dépasse la population totale en comptant la croissance accordée, la commune se doit de redimensionner ses zones à bâtir et valoriser les parcelles restantes jusqu’au terme de cette période de 15 ans. Les communes peuvent, pour cela, obliger les propriétaires à construire sur les zones à bâtir non-déclassées. La loi dans le Canton de Vaud prévoit un délai de 7 à 12 ans ou la conclusion de contrats administratifs avec les propriétaires qui incluent une obligation de construire dans un certain délai.
Possibilités pour les propriétaires
Si le Canton valide le nouveau plan général d’affectation communal après sa remise, la commune soumettra son plan à l’enquête publique. C’est à ce moment que les propriétaires ont l’occasion de participer au processus. Une fois que le plan d’affectation est à l’enquête publique, les propriétaires qui ne sont pas satisfaits des changements dans la planification, peuvent faire opposition auprès de la commune dans les 30 jours suivant la publication du plan. La commune organisera une séance de conciliation et adaptera éventuellement le plan d’affectation pour le soumettre une nouvelle fois pour approbation au Canton. Cette décision peut par la suite faire l’objet d’un recours à la cour administrative du Tribunal cantonal dans un délai de 30 jours. Même si un terrain n’est pas déclassé, d’éventuelles oppositions d’autres propriétaires ou habitants peuvent remettre en question son maintien dans la zone à bâtir. Il est de ce fait conseillé de suivre de près l‘évolution de la situation.
Demande d’indemnisation
Les propriétaires ont lors d’un déclassement de terrain en zone agricole, dans certains cas, le droit à une indemnité pour expropriation matérielle (atteinte à la propriété qui s’assimile à une expropriation dans ses effets). La demande doit remplir plusieurs conditions afin d’être qualifiée pour une indemnité. Pour qu’une expropriation matérielle soit admise et une indemnisation accordée, les conditions suivantes doivent être remplies : (1) atteinte grave à la propriété et (2) forte probabilité que le terrain aurait pu être construit au moment de la modification du plan. Chaque situation est analysée au cas par cas et une atteinte grave à la propriété est en principe admise quand il ne reste plus d’utilisation sensée du terrain pour le propriétaire après l’entrée en vigueur de la mesure de planification. La durée de cette atteinte doit être définitive ou d’une durée d’au moins 10 ans. Si l’atteinte à la propriété ne vas pas aussi loin, une expropriation matérielle peut encore être admise si la position du propriétaire paraît insoutenable pour le public et que l’égalité des droits n’est pas respectée.
La jurisprudence du Tribunal fédéral ajoute cependant une variable importante à prendre en considération.[1] Une parcelle classée en terrain constructible peut malgré son statut être considérée comme parcelle non-classée lorsque le plan général d’affectation, même si autrefois approuvé par le Canton, était surdimensionné au moment de son approbation et ne répondait de ce fait pas au cadre légal de la LAT de l’époque. Un terrain non-classé ne peut ainsi pas être considéré comme déclassé et une demande d’indemnisation pour expropriation matérielle ne sera pas prise en considération.
Une indemnisation se monte à la valeur vénale de la parcelle après soustraction de la valeur résiduelle restante suivant le changement de planification.
Une indemnisation n’est pas aisée à obtenir. Chaque cas concret doit être analysé de façon à déterminer si les conditions pour l’octroi d’une indemnisation sont remplies.
Recommandations
Nous recommandons aux propriétaires de se renseigner sur la situation de la commune où se situe le ou les terrain(s) concerné(s) et de suivre les informations transmises par les communes pour ne pas manquer l’affichage au pilier public ou dans la feuille des avis officiels de la mise à l’enquête du nouveau plan d’affectation. Cela est principalement recommandé pour les propriétaires de terrains non-bâtis ou partiellement bâtis dans les communes surdimensionnées.
Les avocats de l’étude H&B Law sont à votre disposition pour répondre à vos questions et vous accompagner lors de la révision d’un plan d’affectation ou tout autre processus légal.
[1] ATF 1C_573/2011 du 30 août 2013.